LE FURET ÉGARÉ

Deuxième enquête du capitaine Romain Brunie, le furet égaré est une sorte de poursuite sur une période très courte :

Une riche bourgeoise du XVIe arrondissement de Paris gisant dans une flaque de sang. Un mari en fuite, une course poursuite qui se termine dans un lac. Une affaire close ? Mais que contient cette étrange mallette retrouvée dans le véhicule immergé ? Qui est cet homme qui, bien plus tard, échoue aux portes d'un hangar, la mémoire éteinte ? Et pourquoi cet acharnement à se rendre à Limoges, avec 7€ en poche, à la recherche de son passé ? D'est en ouest, le capitaine Brunie va parcourir les routes afin de comprendre, tandis qu'un mystérieux tueur agit dans l'ombre, brouillant toutes les pistes. Une seule alternative : trouver en premier ce « furet baladeur » qui porte en lui la réponse à toutes ces questions. Une « road story » haletante sur deux jours, une course en avant où l'enjeu est la vie même des participants...

Depuis plus de vingt ans, Denis Julin s'est fait remarquer lors de plusieurs concours de nouvelles à travers la France et à l'étranger. Son premier roman, La lézarde du Hibou, a rencontré auprès du public un succès encourageant. Il nous livre ici une deuxième enquête du capitaine Brunie, ce jeune policier de 35 ans lancé à la poursuite d'un suspect pas comme les autres. Une instruction éclair, empreinte d'amour et de mort, dans un univers mêlant la haute bourgeoisie et la Défense...

Sorti le 5 juin 2019, cet opus est très bien accueilli par les lecteurs (voir témoignage lecteurs). Cette enquête n'a rien à voir avec le Hibou et peut être lue en premier.

ATTENTION : Actuellement, ce livre est en rupture de stock. Suite à mon départ de la maison d'éditions pour cause de distribution mensongère, j'ai renvoyé les exemplaires restants. Peut-être en reste-t-il chez mon "éditeur" ???

Critiques net :

https://ma.fabrique.de.polars.over-blog.com/  du 7 juillet 2019

https://www.k-libre.fr/klibre-ve/index.php?page=livre&id=5526

https://surlaroutedejostein.wordpress.com/2019/08/10/le-furet-egare-denis-julin/

Extrait...

Le bruit sec claqua comme un coup de fouet, découpant une petite ouverture ronde dans le métal vert. Arnaud ressentit comme un coup de poing au ventre, une boule d'angoisse difficilement maîtrisable. Cela eut pour effet de déclencher une panique incoercible dans sa tête. Fébrilement, sans réellement arriver à contrôler ses gestes, il s'appuya un peu plus contre le bord de l'embarcation. De l'eau lui giclait au visage et dans sa fièvre, le ciel parut animé d'une frénésie débridée. Dans un mouvement réflexe pour fuir le firmament endiablé, il roula sur lui-même et chuta dans l'eau glacée. La barque retomba mollement sur son assise, offrant au lac troublé son flanc percé. L'eau se rua à l'intérieur, attirant irrémédiablement la fragile embarcation vers les profondeurs glauques... Arnaud, lui, coulait déjà. Ses vêtements gorgés d'eau l'entraînaient vers le fond. Au-dessus de lui, sur la toile de la vie, le bateau luttait encore contre son destin. Le vent irisait la surface, créant de minuscules vagues bariolées. Arnaud contemplait tout cela et se sentait bien. Une plénitude l'envahissait, le froid engourdissait ses membres et calmait ses douleurs. D'un œil amusé, il remarqua cette espèce de vapeur rougeâtre qui paraissait sortir de sa tempe et se diluait lentement dans l'immensité liquide. Cela créait des volutes carmin qui dansaient dans la lumière du jour. Son esprit ankylosé lui jouait maintenant des tours, créant des formes étranges devant ses yeux. Une maison dans les bois, une tache rouge qui s'élargissait sur un mur lézardé, un visage d'enfant... L'homme perdu sursauta : ce visage lui souriait, celui d'une petite fille blonde aux grands yeux bleus, bien sage, immobile dans une robe bleu azur dont les manches s'ornaient d'une frange de broderie anglaise. Sa bouche s'arrondissait en un mot que la distance l'empêchait d'entendre. Pourtant les lèvres fines murmuraient éternellement ce mot, deux syllabes comme une invite, un appel, une exhortation...

Papa...

Arnaud secoua la tête. La vision fugitive avait ramené une particule de lucidité dans son esprit engourdi. Brutalement, ses bras et ses jambes se mirent en action. La pression fouillait ses oreilles, martyrisant ses tympans. D'une rapide détente, il délaissa ce monde glacé qui déjà le considérait comme sien puis s'élança vers la lumière. Ses poumons le brûlaient. La surface était à des kilomètres et chaque mouvement déclenchait sous son crâne un maelström de douleur. Le froid engourdissait ses muscles et ses efforts pour fuir l'état liquide lui semblaient dérisoires, risibles même. Pourtant, au bout d'un temps infini, il perça la croûte liquide, offrant son visage de mourant à la morsure bienfaisante du vent, aspirant ce merveilleux air glacé à s'en faire exploser les bronches. Malgré la douleur et le poids de sa mise, il batailla avec les éléments liquides, agitant ses membres jusqu'à ce que son corps meurtri mais vivant échoue sur le rivage, comme un bateau démâté craché par l'océan. Il demeura ainsi de longues minutes, recherchant son souffle tout en laissant l'eau impie fuir ses vêtements. La grève était grasse de boue et d'herbe folle. Ses mains crochetèrent l'humus et il se hissa encore un peu plus haut. Le visage contre le sol salvateur, il entrevit l'agonie de la barque, son ultime sursaut sur l'onde puis sa proue bravant une dernière fois les frimas de janvier avant de disparaître définitivement vers les abysses. Quelques bricoles flottaient encore sur l'eau, piètres témoins de la catastrophe. Arnaud releva lentement la tête. Le vent et le courant l'avaient amené juste entre les deux îles. De sa position, il ne voyait pas le rivage d'où il était parti. D'ailleurs était-il parti de quelque part ? Que faisait-il sur ce lac ? Où était-il ? Une dernière question se fraya péniblement un chemin dans sa mémoire déchirée, une question qui l'effraya et à laquelle il ne trouva aucune réponse :

Qui était-il ???