POINT MORT

Après la blessure reçue dans sa dernière enquête (lire "Pas de Paradis pour Saint-Pierre"), le capitaine Romain Brunie peine à retrouver le chemin de son bureau. Si ses motivations sont toujours aussi présentes, les atteintes physiques l'ont laissé sans force et sujet à de violents maux de tête. Durant sa convalescence, l'un de ses adjoints lui fait découvrir le rassemblement mensuel de voitures anciennes à Limoges le premier dimanche de chaque mois. Cette action anodine débouche sur une nouvelle enquête que Brunie aura du mal à maîtriser. Pourquoi tous ces enlèvements? Pourquoi aucune rançon n'est exigée ? Quels sont les motifs des ravisseurs et surtout qui sont-ils ? Dans les odeurs d'huile minérale ou de vieux cuir, scandée par le cliquetis des cames de soupapes ou le glissement feutré des véhicules de collection, sa quête de la vérité empruntera bien des chemins tortueux avant d'aboutir à une réalité incroyable, véritable Graal pour tous ces passionnés...

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Extrait...

...Un éclat de lumière illumina le sous-bois. Sur la droite, son œil accrocha le reflet d'un rayon de soleil jouant sur une vitre. Garée en bordure de chemin, à une trentaine de mètres de la route, la traction, portière ouverte, baillait d'ennui sur un tapis de fougères. Près d'elle, deux silhouettes poussaient une troisième vers un fourgon couleur de sous-bois. Durant une seconde, un éclair roux marqua sa rétine. Le temps qu'il comprenne, disparaissant déjà sous la ramure des arbres, l'arrière de la camionnette lui jeta un ultime clin d'œil lumineux.

- Merde !

Crauchet pila, ressentant aussitôt un léger choc dans le châssis. La Nsu n'avait pas apprécié le coup de frein et venait de heurter le cul de la dépanneuse. Sans penser à autre chose que l'enlèvement de sa cible et l'urgence de la délivrer, il vira dans le chemin, à angle droit, écrasant au passage une poignée d'orchis. Rasant la Citroën abandonnée, il accéléra, s'accrocha au volant, le regard fixé sur la silhouette fuyante qu'il distinguait à peine dans la pénombre du bois. La goélette malmenée rebondissait dans les ornières, avalant des mètres et des mètres de sente sans arriver à réduire la distance qui la séparait de sa cible. Celui qui conduisait, là devant, s'y connaissait en pilotage. Son véhicule paraissait survoler les bosses et avaler les courbes plus vite que son ombre. Et lui il galérait avec un véhicule plus lourd et moins nerveux. Même sans le rattraper vraiment, il aurait aimé s'en rapprocher afin de relever l'immatriculation ou bien un quelconque renseignement de marque ou de modèle, mais c'était impossible. Pourtant Crauchet gardait espoir. Le passage serpentait entre les arbres et de temps à autre le haut de la potence touchait des branches trop basses, provoquant de sinistres claquements. Le talkie, jeté sur le siège passager, n'avait pas résisté longtemps. Au premier coup de frein, projeté contre le tableau de bord en acier, il avait roulé à terre, hors d'atteinte. De temps à autre, la voix de Brunie s'élevait, presque indistincte vu le bruit du moteur.

Tout à coup, la fourgonnette vira sur la gauche, disparaissant quelques secondes du paysage, là où le chemin forestier rattrapait la départementale dont il distinguait déjà le ruban sombre. Ralentissant à peine, Crauchet changea de rapport à la volée puis jeta la dépanneuse sur le bitume. Comme s'il avait pressenti l'urgence de la situation, le vieux Renault parut retrouver un souffle nouveau. Il bondit presque vers l'avant, tentant de rejoindre le véhicule des ravisseurs. Mais au bout de quelques minutes, la dépanneuse fut distancée. Malgré son adresse, Crauchet perdit de vue la fourgonnette. Il passa un carrefour puis deux. Au troisième, il stoppa au milieu de l'intersection. Partout où portait sa vue, il ne relevait plus aucune trace des ravisseurs. Le paysage était désert. Il balança la portière vers l'extérieur puis sauta à terre.

- Merde ! conclut-il en fouillant l'horizon.

Il s'empara du talkie, pressant le contact sans pouvoir émettre. Dans la poursuite, l'antenne souple s'était désolidarisée du boîtier, le rendant inopérant.

- Merde ! jura-t-il une nouvelle fois en le rejetant sur le siège.

Il pivota vers l'arrière de la goélette. La Prinz avait disparue, expliquant le soi-disant regain de souffle de la dépanneuse. Il n'en restait qu'une mince barre chromée, le pare-choc avant, oscillant au gré du vent au bout du crochet d'acier.

- Et merde ! murmura-t-il en s'asseyant sur le marchepied et en plantant les dents sur trois pauvres berlingots en sucre doré.

Denis Julin - Littérature, nouvelles et polars
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